Michelle, ma belle

9226_313119100098_313114855098_9086934_8111671_nDans la lignée de Yo Majesty, les filles d’OMG Michelle redéfinissent le crunk – ce rap électronique du sud des États-Unis, calibré pour le dancefloor – version queer.

Marchant sur les traces des grandes soeurs de Salt N Pepa, Chaydha, Helen, Melanie et Alisa ont envahi les clubs de Manhattan et d’ailleurs, propulsées par le tube “You don’t know Michelle”.

Chaydha et Helen avaient électrisé la MC2 lors d’une date exclusive en France pour une Blonde on Blonde* spéciale Mois Américain de Grenoble (voir vidéo). Plus d’un an après, j’ai eu envie de savoir ce que devenait ce groupe plein de promesses.

Rescue : Cela fait 2 ans qu’OMG existe, il y a eu pas mal de changement au sein du groupe. Quelle est votre situation aujourd’hui ?
Helen : Je crois qu’en novembre dernier, c’était le deuxième anniversaire des débuts d’OMG. Au cours de ces deux années, il y a eu quelques changements. Au départ, on travaillait avec Kingdom comme compositeur unique. On était cinq. Maintenant on est moins nombreuses. On se produit généralement en trio, mais on est toujours plus ou moins quatre. Moi, Chaydha et Melanie sommes les membres principaux d’OMG, mais Alisa fait aussi partie du crew.
Chaydha : J’aime beaucoup bouger. Donc j’avance et je recule ici et là. Michelle a une façon de gagner et de perdre des membres. Par moments, je ne connais pas vraiment Michelle. On a quelques projets communs avec d’autres artistes. Des amis avec qui on traîne come Pozsi Technicolor Banshie et Cunty Crawford Ladosha.

R: Vous êtes jusqu’ici avant tout un groupe de scène, vous vous êtes beaucoup produites en live. Vous avez enregistré peu de titres, mais j’ai entendu dire que vous étiez en ce moment en train de travailler sur de nouveaux morceaux en studio, ce qui est une super nouvelle ! Est-ce que vous pouvez nous en dire un peu plus ?
C : Je crois que c’est une remarque très importante. On est vraiment un groupe qui honnêtement s’épanouit au contact d’un public. On a eu de la chance de trouver des compositeurs vraiment talentueux. Mais malheureusement on se retrouve dans la situation où l’on doit rassembler nos talents collectifs et notre cash pour créer notre propre son. En gros être responsable de la production du début à la fin.
H : Notre rythme de travail est vraiment lié à notre programme de concerts. On n’est pas un groupe qui travaille de façon régulière. On est plutôt des perfomers, c’est sûr. En général, on ne produit pas une tonne de trucs entre les shows. On travaille plutôt dans l’optique de faire des instrus plutôt que de terminer des titres en studio. On a des nouvelles chansons, mais il faut qu’on les enregistre. Personne ne sait quand cela va se produire.

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R : J’ai l’impression que DJ Kingdom, votre producteur/compositeur, ne va pas tarder à exploser. A la question, “Qui est la personne à laquelle le monde devrait prêter plus d’attention ?”, Jubilee répond dans une interview pour Mixpal records : “Kingdom. Son disque qui est sur le point de sortir peut être décrit comme “OMG” (Oh My God).”
L’avez-vous écouté ? Êtes-vous d’accord avec elle ?
H : Oui l’album est sorti récemment. Il est vraiment bon comme tout son travail. Kingdom est super, super talentueux. La raison pour laquelle on a travaillé avec lui au départ est que j’étais un énorme fan de sa première mixtape. Il travaille dur depuis des années et il est temps pour lui d’exploser.
C: Kingdom fait toujours des choses incroyables. Il continue à m’époustoufler. Quasiment tous ceux qui entendent ses mixtapes, ses sets ou ses projets se baladent pieds nus (en référence à “blowing ones sock off“, littéralement “souffler ses chaussettes”, qui signifie “être époustouflé”). Je ne suis pas tellement “OMG!“, mais plutôt “Sans dec’ !!” Je n’attends rien de moins que vous vous éclatiez sur sa musique.

R : Est-ce que vous travaillez toujours exclusivement avec lui ? Avec quels artistes auriez-vous envie de collaborer ?
H : Non, Kingdom n’est pas le seul producteur avec qui nous travaillons. Nos premières chansons (les seules qu’on ait eues pendant longtemps) étaient toutes de Kingdom. Une poignée de producteurs nous ont composé des beats et on reçoit des beats de partout. On collabore à tour de bras. On est devenues expertes en collaboration.
C : Comme je l’ai dit, Michelle prend différentes formes, selon qui est en ville, avec qui on a partagé notre dernier repas, voire qui s’est pointé pour faire une impro avec nous sur le dancefloor. Il y a un certain nombre d’artistes avec lesquels j’aimerais collaborer, mais pour le moment je veux vraiment m’appliquer à renforcer les dynamiques et les talents de composition de notre propre groupe.

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R : Depuis la France, la scène musicale en général et queer en particulier de Brooklyn semble très vivante ; ressentez-vous cette émulation ? De quels groupes, de quels artistes vous sentez-vous les plus proches ?
C : C’est clair que la communauté queer est florissante ici. Brooklyn a quelque chose d’assez exceptionnel. On est venu ici pour vivre notre vie. Là d’où je viens, dans le Sud, il y avait peu de lieux pour les communautés créatives. Beaucoup de queer que je connais ici, moi y compris, viennent de ces lieux de pénurie. Brooklyn a fourni l’espace, les lieux, nourri la créativité et ma QUEERITUDE globale.
H : Je ne crois pas vraiment que ce qu’on fait soit très proche de ce que font les autres. Je me sens proche (dans mon coeur, géographiquement, dans mes relations quotidiennes et dans mes goûts) d’House of Ladosha, Balls to the Walls, Designer Imposter, Kingdom. Tous excellents dans ce qu’ils font. Tous de Brooklyn.

R : Vous jouez proportionnellement beaucoup plus à Brooklyn qu’à Manhattan. C’est difficile en tant qu’artiste de Brooklyn de franchir le pont pour jouer à Manhattan ? Est-ce que le mythique clivage Manhattan / Brooklyn existe encore ?
H : La ligne mythique n’existe plus. Je ne crois pas. Le lien entre Lower East Side et Williamsburg semble plus solide qu’entre LES et d’autres parties de la ville. Je sais pas, je crois. Pour la plupart des gens que je connais, Brooklyn est aussi excitante voire plus excitante que Manhattan. Pendant longtemps la plupart de nos concerts à NYC avaient lieu à Manhattan. Maintenant, on joue plus à Brooklyn. On est un groupe de BK et je crois qu’on est souvent identifié en tant que tel.
C : Non. On vit et on travaille à Brooklyn, mais on contrôle New York !

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R: Vous avez eu l’idée de former OMG Michelle car la musique que vous entendiez en club ne vous plaisait pas, vous aviez envie de faire du son que vous aimiez. Est-ce que vous sortez toujours autant ? Quelles sont les meilleures fêtes queer pour sortir à NYC ?
H : Oui, c’est vrai. OMG est né parce qu’on voulait s’amuser plus. Nos soirées queer préférées en ville ? Les soirées privées sont la dominante à BK. On a des amis qui vivent dans un hôtel particulier de quatre étages appelé “The Living House” alias “The Mansion“. Je crois que ma meilleure soirée de 2009 était une fête qu’on a organisée avec eux et Designer Imposter à The Mansion. Pantyhos Party est comme une affaire de famille. On est de fidèles participantes depuis 2 ans. Il se trouve que j’ai été physio là-bas pendant un an et demi. Je suis allée à Hotel Motel deux fois et c’était super fun. Beaucoup plus que je ne m’y attendais.
Alisa: Toutes les soirées sont chiantes, tout le monde devrait rester chez soi et s’occuper.
C : Les soirées ne sont pas chiantes en elles-mêmes… Mais elles impliquent un certain niveau de consommation de substances dont je préfère me détacher en dansant.

R : Vous n’êtes pas cantonnées au ghetto queer puisque vous vous produisez aussi bien dans des soirées queer que des soirées orientées “urban music“. Est-ce que la réponse du public est différente selon que vous jouez dans l’un ou l’autre type de soirée ?
H : On a de bons retours de partout. La plupart des promoteurs avec qui on a travaillé ne sont pas queer. Jouer dans des soirées qui ne sont pas majoritairement queer n’est pas inhabituel pour nous.
On a beaucoup de retours positifs à ces concerts. On a joué récemment à Philly et des mecs straight sont devenus cinglés ! Les mecs traînent à fond à nos concerts. C’est assez irréel. Je suis complètement d’accord avec ce que tu dis. On ne se limite pas. On essaie toujours plus ou moins de dépasser tout ça. Les limitations qui existent sont définies par les autres, pas par nous. J’imagine qu’OMG est rangé dans la catégorie “urban” parce qu’on rappe et parce qu’on est Noires. Ce qui est drôle c’est que la plupart des gens qui nous ont suivies jusqu’ici sont Blancs.

http://www.youtube.com/watch?v=cN0vUXF1hsU

R : L’élection d’Obama a secoué le monde entier. Plus d’un an après, avez-vous ressenti une incidence de son élection dans votre vie en tant que Noires ? Lesbiennes ? Femmes ?
H : J’ai eu la fièvre Obama l’année dernière. Je ne suis plus une énorme fanatique. J’adore le président bien sûr, mais je me suis calmée. Ce que j’aime plus que tout, c’est que les enfants voient que le président est Noir. Les enfants de toutes races. Quand j’étais petite, j’étais du genre “Je vais être présidente – je peux être tout ce que je veux.” À l’âge de 8 ans, j’ai découvert que c’était faux. Les gamins ont maintenant un exemple très radical de la façon dont des choses folles, incroyables, peuvent devenir réalité. Les choses les plus énormes, les plus bizarres, les plus improbables.
Je ne suis pas du genre à faire la morale, sur le fait qu’en travaillant dur on puisse devenir président, ou vivre confortablement, avoir une retraite, être capable de prendre soin de soi-même et de ses proches, posséder des biens ou réussir dans la vie. Je ne me considère pas comme une “self-made-woman” et je ne fais plus tellement valoir ce genre d’idées …. Ceci dit je dois dire que c’est puissant de voir comment travailler dur a réussi à une personne noire talentueuse, dévouée et éduquée.
C : Malheureusement pas sur le plan pratique, mais pour moi symboliquement sa présidence est devenue une référence puissante dans ma performance. J’attends toujours des fonds pour les rappeurs, dans le genre de ceux que Franklin D. Roosevelt avait mis en place pour les artistes.

R : Un message pour les Françaises qui nous lisent ?
H : Un message pour les french chicks. “I don’t speak French but I’ll tounge you down?” Je déconne, je déconne. C’est l’accroche de ma chanson préférée. Aux Françaises — on vous aime ! Chaydha et moi on est allées dans un American Apparel dans un centre commercial à Long Island le mois dernier. Au cas où vous ne le sauriez pas, c’est un endroit vraiment pas cool. Genre vraiment, vraiment pas cool, pas branché du tout. On y a rencontré la plus merveilleuse, la plus belle des filles. Elle était Française. Une Noire française qui travaillait là-bas. Elle avait l’air bien trop cool pour travailler dans ce centre commercial. Je l’aime et je vous aime vous, les Françaises. Mon autre message est “Ne fume pas de hash”. Je déconne. Je m’en fous.
C : Célibataire et prête à faire des rencontres !! Je déconne. Non vraiment, restez positives.

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R : Vos cinq titres préférés en ce moment ?
H : Gucci Mane et la Swag music orientent ma vie.

1. Moments In Love – Gucci Mane, Jagged Edge et Trina
2. Speak – French Jamie Foxx et Gucci Mane
3. Pussy Rehab – Gucci Mane et Playaz Circle
4. Ball Rich Kids
5. Mr Hit That Hoe Treal Lee Prince Rick
Est-ce que je peux esquiver et dire les remix de Lil Wayne (Wasted) et Swag Surf de la nouvelle mixtape ? Est-ce que je peux tricher et dire 7 chansons ?

C & A
Bonnie Raitt – I cant make you love me
Black box – Everybody Everybody (Alisa)
Mariah Carey – Vanishing
Talking Heads – Naive Melody (Chaydha/Alisa)
Donnie Hathaway – A song for you

R : Quelque chose à ajouter ?
H : OMG greatest rapper alive — ready to play your town. Swag to the ceiling. Holla at ya girl.

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* Prochaine Blonde on Blonde spéciale Têtue vendredi 12 février au George 5, Grenoble, avec Gachette of the Mastiff en live, Solutricin, Mag, Rescue
http://www.tetu.com/clubbing/evenement/blonde-on-blonde-speciale-tetue-1011

Merci à La Fraicheur et Arms’D pour leur aide précieuse dans la traduction de l’argot de Brooklyn !

Photos © A. Picard & I. Stragliati



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